Ce 12 mai dans une déclaration inattendue, Tidjane Thiam a annoncé sa démission de la présidence du PDCI-RDA, à quelques jours d’une décision judiciaire attendue sur la validité de son élection à la tête du parti. Une décision surprise, mais qui semble s’inscrire dans une stratégie politique de préservation de l’institution face à une potentielle instabilité juridique.
Depuis plusieurs mois, une procédure judiciaire menée par Valérie Yapo, militante et membre du bureau politique du PDCI, remet en cause l’éligibilité de Tidjane Thiam à la présidence du parti. La requête repose sur l’article 48 du Code de la nationalité ivoirienne, selon lequel un citoyen perd automatiquement sa nationalité ivoirienne dès lors qu’il en acquiert une autre.
Or, les juges ont considéré que Thiam, n’ayant pas pu prouver qu’il était né français, aurait acquis sa nationalité française volontairement à l’âge adulte. En conséquence, il aurait perdu sa nationalité ivoirienne à ce moment-là, ne la retrouvant qu’en mars 2025 après y avoir officiellement renoncé. Cela poserait problème au regard des textes du PDCI, qui exigent que son président soit de nationalité ivoirienne.
Une démission stratégique
La démission de Tidjane Thiam, rendue publique via un communiqué publié dans la nuit, peut être interprétée comme une manœuvre pour éviter une mise sous tutelle du parti par les autorités. En se retirant avant la date du 15 mai — à laquelle la justice doit statuer sur la validité de son élection —, il permet au PDCI de maintenir la stabilité de sa direction, aujourd’hui assurée par le doyen d’âge des vice-présidents par intérim.
En l’absence de démission et en cas de suspension judiciaire, le parti aurait pu se retrouver sans direction légitime, ce qui aurait ouvert la voie à une administration provisoire placée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur. Un scénario redouté par les cadres et les militants du parti.
Mais malgré cette démission, Tidjane Thiam pourrait être réélu à la tête du parti lors du congrès extraordinaire prévu le 14 mai, soit un jour avant la décision judiciaire. Depuis qu’il a renoncé à sa nationalité française, il est à nouveau exclusivement ivoirien. Cela rend sa candidature juridiquement plus solide, mais d’autres arguments subsistent.
Parmi eux, l’accusation selon laquelle Thiam ne remplirait pas les conditions d’ancienneté dans les instances du parti, en particulier les dix années de présence requises au sein du bureau politique. Ce point pourrait faire l’objet de nouvelles contestations.
Autre difficulté en vue pour l’ancien ministre, Tidjane Thiam n’est actuellement pas inscrit sur les listes électorales, ce qui pourrait compromettre toute ambition présidentielle, indépendamment de son statut à la tête du parti.
Un calcul politique au cœur de la stratégie
La décision d’organiser un congrès avant la décision de justice interroge. Si Thiam est réélu le 14 mai, puis que la justice invalide son élection initiale le 15 mai ou lui impose des restrictions, le parti pourrait se retrouver dans une nouvelle impasse. Néanmoins, le PDCI semble déterminé à maintenir Thiam comme figure de proue, considérant qu’il dispose d’un large soutien parmi les militants.
Céder à la pression judiciaire serait, pour certains cadres du parti, une victoire offerte à ses adversaires politiques. Dans cette logique, éviter un « plan B » serait une forme de résistance politique autant qu’une stratégie électorale.