Le président de la République sera ce mardi l’invité d’une émission où il répondra aux questions de figures issues de la société civile. Cet événement marquera une occasion pour lui de discuter de la politique nationale, sujet sur lequel il s’est montré discret depuis la dissolution de l’Assemblée.
Cette émission spéciale, diffusée sur TF1 le 13 mai à partir de 20h10, constitue une opportunité pour Emmanuel Macron de se repositionner après la dissolution de l’Assemblée en juin 2024. Il participera pendant deux heures à un échange, ponctué par des interventions de personnalités de divers horizons, dont le youtubeur Tibo Inshape, la syndicaliste Sophie Binet et le journaliste Charles Biétry, atteint de la maladie de Charcot. Ce format vise à établir un nouveau lien avec les citoyens.
« La vraie question n’est pas de renouer le contact avec les Français. Je laisse ce type de discours aux opposants. Le lien est toujours là », affirme Prisca Thévenot, députée des Hauts-de-Seine et ex-porte-parole du gouvernement. Aussi, pour un proche du Macron, « Le président s’exprime dans un contexte géopolitique extrêmement sérieux qui suscite des inquiétudes chez les Français », notamment les conflits en Ukraine et à Gaza, les tarifs douaniers américains, ainsi que les répercussions des actions de Donald Trump sur l’ordre mondial.
Le discours qu’Emmanuel Macron avait prononcé le 5 mars dernier se concentrant sur les questions internationales avait attiré plus de 15 millions de téléspectateurs. Cependant, le format du 13 mai sera nettement plus long, permettant ainsi de traiter divers sujets, notamment ceux relatifs à la politique intérieure.
« Huit ans se sont écoulés. Il reste deux ans à son mandat, dans un cadre institutionnel sans précédent, et le président veut en tirer parti jusqu’à la dernière minute. »
Emmanuel Macron réussira-t-il à regagner la faveur de l’opinion publique en ces deux dernières années de mandat ? « Avec le temps, beaucoup de choses peuvent changer », note Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande, ajoutant que son retrait de la scène intérieure depuis la dissolution a certainement contribué à stabiliser sa popularité.
Le baromètre Ipsos pour La Tribune Dimanche du 12 avril montre en effet une petite remontée des cotes de popularité de Macron après une période de baisse intense suite à la dissolution de l’Assemblée nationale et à l’instabilité politique qui a suivi les élections législatives anticipées n’ayant abouti à aucune majorité claire.
« Son autorité a été renforcée dans la réaction européenne face à Donald Trump, ce qui a conduit à un regain d’intérêt parmi les électorats modérés de gauche et de droite qui sont en phase avec lui sur les enjeux internationaux. Cela a provoqué un effet d’entraînement, bien que modeste », analyse Mathieu Gallard, directeur d’études chez Ipsos.
Bien que ce regain soit insuffisant pour expliquer pleinement cet engagement, le contexte politique pourrait être plus propice selon Gaspard Gantzer : « Il est possible qu’il se sente avantagé par rapport à son Premier ministre, dont les initiatives n’ont pas été couronnées de succès », affirme-t-il. « De plus, les partis politiques traversent des difficultés internes : tensions au sein de LFI et du RN, ou rivalités au sein du PS et des LR. L’environnement est relativement dégagé pour qu’il soit entendu. »
Le choix de ses interlocuteurs, tous extérieurs au cadre traditionnel de la politique, à l’image de la journaliste Salomé Saqué ou de Cécile Duflot, directrice d’Oxfam France, perçue comme critique à son égard, montre une volonté de s’éloigner de l’actualité politique habituelle. Reste à savoir si cela sera suffisant pour amorcer un nouveau départ.
« Les Français ont commencé à lui tourner le dos. Ils reconnaissent qu’il s’occupe des crises géopolitiques, mais leurs attentes en matière de politique nationale sont faibles. »
« Emmanuel Macron donne l’impression d’être déconnecté des préoccupations des Français, une perception renforcée depuis le mouvement des ‘gilets jaunes’. Revenir sur le devant de la scène intérieure par le biais d’un référendum pourrait ne pas être la meilleure option », estime Mathieu Gallard, observateur d’opinion.
Donner la parole directement aux citoyens à travers des référendums est l’une des astuces que le président envisage – une éventualité qui pourrait être confirmée ce mardi sur TF1. Toutefois, cette initiative suscite la méfiance des oppositions, qui soulignent : « Le référendum peut être un excellent moyen d’impliquer les Français, mais Emmanuel Macron a tendance à dévaloriser des outils démocratiques », déclare la députée écologiste Sandra Regol.
« S’il souhaite vraiment parler aux Français, cela doit être concret, pas de grandes phrases. Comme il savait faire en 2017. Cette émission ne doit pas être qu’une simple avant-première des annonces », prévient Prisca Thévenot. Le lendemain, Emmanuel Macron se rendra sur le thème de la sécurité et de la lutte contre la criminalité organisée, une manière de se rapprocher des préoccupations des citoyens malgré un retour aux affaires intérieures.