Un homme trans ayant contesté le refus de la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Bas-Rhin concernant la prise en charge de sa mastectomie a remporté son procès mercredi au tribunal de Strasbourg. Selon son avocate, cette décision est qualifiée de «inédite» en France.
Le tribunal judiciaire de Strasbourg a ordonné à la CPAM de couvrir les frais de l’intervention chirurgicale de mastectomie bilatérale, tout en lui enjoignant de verser 3000 euros de dommages et intérêts au requérant. Dans sa décison, le juge a souligné que les conditions imposées par la CPAM, telles qu’un certificat médical et un protocole d’accord, sont contraires aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l’homme, créant de facto des inégalités d’accès aux soins en raison de l’identité de genre.
La CPAM a ainsi été reconnue coupable d’avoir commis une «faute», causant un «préjudice direct et certain» à la personne concernée, qui s’est retrouvée confrontée à des délais supplémentaires et injustifiés dans un parcours de soins déjà long et complexe. Cela l’a contraint à vivre une transition non finalisée, en désaccord avec son nouvel état civil.
Laura Gandonou, l’avocate du requérant, «c’est la première fois qu’un juge français reconnaît le caractère discriminatoire du refus de la CPAM et l’atteinte à la vie privée. C’est inédit. » De son côté, le requérant, âgé de 31 ans et souhaitant garder l’anonymat, a exprimé son soulagement. Pour lui, «c’est une décision que j’attendais depuis longtemps. J’espère que cela permettra à d’autres personnes trans de subir moins de discriminations. »
Ayant été assigné sexe féminin à la naissance, cet homme a entamé sa transition en 2017, débutant par une transition sociale. Il a informé son entourage, suivi d’une transition administrative marquée par un changement de prénom et d’état civil, puis une transition médicale avec la prise d’hormones depuis juin 2022. En raison de sa dysphorie de genre, il a sollicité une affection longue durée pour une meilleure prise en charge de ses soins, mais a été confronté à un refus partiel de la part du médecin conseil. Après avoir sollicité une commission de recours amiable en novembre 2022, qui a également rejeté sa demande en janvier 2023, il a décidé d’intenter une action en justice.
Lors de l’audience du 12 mars dernier, la représentante de la CPAM a indiqué que sa décision était fondée sur un «avis médical». En revanche, l’avocate du jeune homme a dénoncé ce refus comme étant «abusif et mal fondé». Elle a également insisté sur le fait que le parcours de soins pour les personnes transgenres devrait être semblable à celui des autres, déplorant que certaines CPAM mettent en place des conditions excessives pour le remboursement de soins liés à la transition de genre.
Me Gandonou défend également huit autres personnes trans ayant engagé des actions en justice contre diverses CPAM à Lyon, Cahors, Bobigny, Toulouse et Grenoble. À Bobigny, deux requérants ayant attaqué la CPAM de Seine-Saint-Denis attendent une décision qui sera rendue le 23 juin. En mars, James Leperlier, président de l’Inter-LGBT, avait signalé que «toutes les CPAM ne traitent pas la transidentité de la même manière. »